Impact social de la crise: des réformes radicales s’imposent

’Si elle est bien digérée intellectuellement, la crise économique pourrait peut-être créer des opportunités pour la relance du processus d’intégration du marché en Europe », a déclaré le président de l’Université Bocconi de Milan et ancien commissaire européen, Mario Monti, à la commission spéciale sur la crise financière, économique et sociale lors d’une audition publique, ce jeudi.

ntervenant lors de l’audition publique de la commission spéciale, M. Monti a cherché à mettre la dimension sociale de la crise dans le contexte de l’intégration du marché en Europe, qui devrait, à son avis, se poursuivre et devenir plus compatible avec le traité de Lisbonne.

« Nous ne devrions pas avoir peur d’ouvrir la question de l’harmonisation des politiques sociale et fiscale, parce qu’aucune question ne devrait être taboue », a déclaré M. Monti. « Sortir de la crise exige ce regard neuf », mais non ‘’l’abandon des stratégies de concurrence », a-t-il ajouté.

Rapporteur de la commission spéciale, Pervenche Berès (S&D, FR), a déclaré qu’elle avait « de plus grandes attentes » que M. Monti et l’a invité à aller ‘’plus loin’’ sur la question fiscale.

Le chômage

La situation en Europe est ‘’épouvantable, avec un chômage de plus de 10% dans certains pays’’, a déclaré le président de la commission spéciale, Wolf Klinz (ADLE, DE). « Les fonds publics ne peuvent pas vraiment y faire face, a-t-il déclaré. M. Klinz a appelé à « des réformes à long terme, qui permettraient à l’Europe de conserver sa compétitivité, de renforcer le marché intérieur et d’assurer la pleine réalisation de son potentiel ».

La crise aura un impact « persistant » sur les individus, ceux qui entrent sur le marché du travail et sur leur potentiel de revenu, a déclaré Sir Tony Atkinson, professeur à l’université de Cambridge et de Harvard. L’UE devrait ‘’réfléchir sérieusement’’ à la garantie d’un ‘’revenu minimum pour les enfants » en tant qu’investissement pour l’avenir. Ce serait un signal clair indiquant que l’UE développe sa dimension sociale, a-t-il dit en réponse à une question de Kinga Göncz (S&D, HU), sur les propositions politiques visant à améliorer la situation.

Les estimations de l’Organisation Internationale du Travail suggèrent qu’il y aura 3 millions de chômeurs de plus cette année et il faudra attendre 2013 avant que l’emploi de l’UE atteigne le niveau d’avant la crise, a dit Alice Ouedraogo, directeur adjoint de l’intégration des politiques sectorielles de l’OIT. D’autre part, 11 millions d’emplois ont été préservés « grâce au paquet social » mis en œuvre par les Etats du G20, a-t-elle poursuivi, avertissant que ‘’nous ne pouvons nous permettre de laisser de coté les mesures de l’Etat providence parce que nous pensons que nous allons sortir de la crise ».

Répondant à Elisa Ferreira (S&D, PT), qui s’est enquise de la coopération au développement social entre les organisations internationales, Mme Ouedraogo a fait observer que la crise avait amené au moins un avantage : une coopération plus étroite entre l’OIT, l’OMC, le FMI, la Banque mondiale et d’autres institutions.

Pensions

Les « coûts budgétaires du vieillissement de la population sont environ dix fois plus élevés que les coûts fiscaux de la crise », a souligné Edward Whitehouse, économiste principal à l’OCDE. « Aucun pays ni aucun système de pension n’est à l’abri », a-t-il dit, mettant en garde contre le risque que certaines régions puissent réduire à néant la réforme des retraites. La manière d’avancer est de diversifier les systèmes de retraite, a-t-il ajouté.

En réponse à Othmar Karas (PPE, AT), qui a demandé ce qui pouvait être fait pour rendre le système comparable dans toute l’UE, M. Whitehouse a répondu qu’un obstacle fondamental à un modèle paneuropéen de régime de retraite est le fait que les pensions soient attribuées de différentes façons dans l’Union européenne. D’autres obstacles sont « la fiscalité, la réglementation et la supervision. »

M. Vit Samek, ancien conseiller spécial du commissaire Špidla sur les systèmes de retraite et vice-président de la Confédération tchéco-morave des syndicats, a relevé ‘’d’énormes différences » entre les soi-disant « anciens » et « nouveaux » États membres dans les sources de revenu des pensions, avec pour les nouveaux un recours beaucoup plus important aux transferts publics. Après avoir décrit les diverses stratégies susceptibles de faire face au vieillissement de la population et les risques pour les fonds de pension, il a conclu que ‘’la meilleure solution est d’avoir non seulement plus d’enfants, mais beaucoup plus d’enfants, en Europe’’.

Prochaines étapes

Les conclusions et observations des experts serviront de base aux nouveaux échanges entre les députés et le rapporteur de la commission spéciale, Pervenche Berès. Le projet devrait être dévoilé le 29 avril, et le rapport final adopté en commission le 13 juillet. Le rapport CRIS sera soumis à un vote du Parlement dans son ensemble lors de la session plénière de Septembre II.