Levons les barrières à l’emploi !

Le Monde
Point de vue
24.10.11

Par Michel Camdessus, Xavier Fontanet, Nicole Notat, Maria Nowak, Michel Rocard, Pervenche Berès

Le chômage, en France, touche en premier lieu les jeunes. Sur le total officiel de 2,5 millions de chômeurs, plus de 1 million ont moins de 30 ans, soit un taux de chômage de 17,4 % contre 9,1 % pour l’ensemble de la population active. Quant aux jeunes de moins de 30 ans dépourvus de diplôme, leur taux de chômage est de 35 % et atteint 40 % dans certains quartiers. L’insertion des jeunes dans le marché de l’emploi est une priorité nationale.
Pour beaucoup d’entre eux, il est trop tard pour entrer en apprentissage ou obtenir un diplôme professionnel. Ils ont besoin de travailler tout de suite, quitte à compléter plus tard leur formation. Leurs chances de trouver un emploi salarié sont faibles. Or, la réglementation, qui prévoit la même durée de formation et le même niveau de diplôme pour les activités appartenant au même secteur, représente un obstacle à la création de petites activités économiques.

Quelles que soient la complexité de la tâche et le risque pour le consommateur, l’exigence est toujours la même : trois ans de formation, qu’il s’agisse d’un mécanicien auto ou d’un réparateur de vélos, d’un paysagiste ou d’un tondeur de pelouse. Ces barrières brident l’initiative des jeunes en les empêchant de se diriger vers des secteurs porteurs et notamment l’écodéveloppement. Faut-il exclure les jeunes et les personnes peu qualifiées du marché du travail, au risque d’alourdir le poids du chômage sur l’économie et la désespérance de ceux qui le subissent, ou adapter la formation aux besoins réels des microentrepreneurs, en respectant à la fois le droit d’entreprendre et la sécurité des consommateurs ?

Nous pensons que la révision du décret du 2 avril 1998, qui fixe le même niveau de qualification pour les activités réglementées par la loi du 5 juillet 1996 relative à la promotion du commerce et de l’artisanat, est une bonne réponse. Au-delà de son effet dévastateur sur l’emploi des jeunes, cette réglementation a deux autres conséquences négatives. Elle crée une distorsion entre l’offre, encadrée par la loi, et la demande insatisfaite des petites prestations qui n’intéressent pas les artisans, aboutissant, in fine, à une rétention de la croissance. De plus, l’absence d’une libre confrontation entre l’offre et la demande provoque une augmentation de prix indépendante de la qualité du travail. Des solutions à l’emploi des jeunes et des adultes peu qualifiés existent.

L’une d’entre elles est la microfranchise solidaire pour faciliter la création d’entreprise par ceux qui n’ont pas l’expérience pour se lancer seuls. N’attendons pas une explosion sociale pour lever les barrières à l’emploi, qui limitent le droit d’entreprendre.

Collectif

Michel Camdessus, ex-directeur général du FMI ; Xavier Fontanet, président d’Essilor ; Nicole Notat, présidente de Vigeo ; Maria Nowak, présidente fondatrice de l’ADIE ; Michel Rocard, ex-premier ministre ; Catherine Barbaroux, présidente de l’Adie ; Pervenche Berès, présidente de la Commission des affaires économiques et monétaires du Parlement européen ; Christian de Boissieu, professeur d’université ; Frédérique Dupuis-Toubol, avocat au barreau de Paris ; Laurence Fontaine, directrice de recherche au CNRS ; Robert Leblanc, président des Entrepreneurs et dirigeants chrétiens ; Paul Lignières, avocat au barreau de Paris ; Michel Meunier, président du Centre des jeunes dirigeants.